Certaines phrases de
Barrès dans ses Cahiers 1896-1923, (Plon, 1993), écrites
avant l'assassinat de Jaurès, ont armé le bras de son assassin :
« Déjà Jaurès, remarquez-le, a pris ses précautions.
Déjà il a quitté à demi la France. Il est citoyen
d'Europe. Il en prend les intérêts, les soucis.
--Enfin, me dit
quelqu'un, il vit de la langue française.
Mais non pas, il est
prêt à vivre de la langue allemande. Il a parlé à Berlin. Dès
maintenant sa pensée est allemande plutôt que française. »
(op. cit. p.670, écrit en avril 1913)
Au lendemain de
l'assassinat de Jaurès, le 31 Juillet 1914, il se rend à son
domicile pour présenter ses condoléances. Il formule alors
l'admiration qui fut la sienne à l'égard de Jaurès : « Quelle
solitude autour de celui dont je sais bien qu'il était, car les
défauts n'empêchent rien, un noble homme, ma foi oui, un grand
homme : adieu Jaurès, que j'aurais voulu pouvoir librement
aimer ! » (p. 736, op. cit.) , tout en réitérant ses
critiques : « Il croyait défendre la cause du
prolétariat français, mais il s'était enfermé dans la pensée
allemande. »(p. 736, op.
cit.).
Tout cela montre la
gravité qu'il y a à tracer des mots dont les conséquences
lointaines peuvent, à chaque instant, nous échapper.
H./Sa/27/6/14/18H20
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