jeudi 6 août 2009

Jeudi 6 Août 2009.

Romilly-Sur-Seine (Aube). 15H16.
Au milieu du XVIII° Siècle, Jean-Jacques Rousseau écrit une langue qui s'est perdue aujourd'hui, --ce dont bien me fâche.
Dans le "Livre Troisième" des Confessions, à la page 117 de l'édition des Classiques Garnier (achevé d'imprimer par l'imprimerie Tardy Quercy S.A., à Bourges, le 10 Avril 1980), à propos de la rencontre de Jean-Jacques et de Mme de Warens, on lit ceci : "Le coup d'oeil de notre première entrevue fut le seul moment vraiment passionné qu'elle m'ait jamais fait sentir; encore ce moment fut-il l'ouvrage de la surprise." . On pense à la rencontre de Frédéric et d' une jeune femme, dans l'Education Sentimentale, qui se conclut par ces mots qui sont l'alpha et l'oméga de tout : "leurs yeux se rencontrèrent". Mais , ici , le regard passionné tient lieu de début et de fin à la passion : "le seul moment passionné". Se lit aussi le poids des contraintes sociales, le poids de la morale : il faut que "la surprise" bouleverse les gestes et les attitudes que doit s'imposer, en tous temps et tous lieux , Mme de Warens, pour rester fidèle aux règles de sa condition.
Et puis , sous la plume de Rousseau, vient cette phrase : "Je n'avais ni transports ni désirs auprès d'elle; j'étais dans un calme ravissant, jouissant sans savoir de quoi." (p. 117, op cit.) . A-t-on mieux défini l'extase, la transcendance d'une émotion, au-delà du désir ? Cette extase profonde, qui vous transporte, abolit le temps et la durée, parce que, tout simplement, on est passé au-delà de leurs rivages : "J'aurais ainsi passé ma vie et l'éternité même sans m'ennuyer un instant." (p. 117, op.cit.).
Toute grande émotion nous donne, en effet, un avant-goût de l'éternité : c'est ce que Rousseau démontre, en quelques mots.

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