lundi 30 juin 2008

Mardi 1 Juillet 2008. 6H10

Il y a quelque chose de plus triste encore que de désirer sans obtenir, c'est de ne plus désirer.

dimanche 29 juin 2008

Lundi 30 Juin 2008.6H22

Il y a dans les "Mémoires d'Outre-Tombe" de Chateaubriand, une phrase terrible sur le vieillissement : "n'être plus que la momie de soi-même".

Dimanche 29 Juin 2008.9H04

Dans ma maison, en Lorraine. Parti de Romilly-Sur-Seine (Aube), hier matin. Arrivé ici, hier, vers vingt heures, après un itinéraire qui m’a mené à Saint-Nicolas de Port (près de Nancy, Meurthe-et-Moselle), puis Thionville (Nancy), puis la banlieue de Nancy, où vit ma mère. Nous avons réussi hier soir, mon fils A. et moi, la connexion Internet sur le « Eee PC, muni de sa clef Internet SFR », que j’avais apporté ici. J’ai traversé la nuit, ensuite, avec mes habituelles apnées nocturnes, dont je n’ai pas conscience, et qui font, de moi, un naufragé de chaque nuit, jusqu’au « naufrage de trop », où tout s’arrête. En attendant, comme me l’a gentiment expliqué le pneumologue, je suis en deçà du « seuil d’alerte » qui autorise le remboursement par la sécurité sociale de la coûteuse machine qui m’aiderait, chaque nuit, à respirer, en envoyant de l’air sous pression, dans les narines, ou dans la bouche, je ne sais plus. Si un de mes lecteurs a un pouvoir de décision dans ce domaine, qu’il fasse le nécessaire, pour qu’on m’accorde une exception ! Il y avait, chez ma mère, une photo couleur vieille de dix-huit ans : mon mariage avec S. la maman d’Alexandre. J’ai une barbe noire et j’ai l’air jeune et radieux. Sur la photo : S., en robe de mariée, et moi et de part et d’autre le père et la mère de S., d’un côté, mon père et ma mère, de l’autre. Aujourd’hui, deux sont morts : les deux grands-pères d’Alexandre. Ce jour-là, pourtant, tous étaient en vie, et souriants. Ainsi va la vie de chacun d’entre nous, jusqu’au jour où, moi-même, je ne pourrai plus sourire que sur une photo, qui sera, comme celle-ci , posée sur un meuble, quelque part. Ce matin, je suis parti dans le jardin avec cisaille et sécateur, n’ayant pas la force, ce matin, de tenir la moindre faux. La récompense de celui qui désenserre la lavande, de l’étreinte des « mauvaises » herbes, c’est ce léger parfum de lavande qui vient, non des fleurs (nous sommes trop en amont dans la saison), mais des tiges et des feuillages, sans doute. Près de l’escalier où se trouve l’autre massif de lavande, qui souffre du côtoiement des « sabots de Vénus » envahissants, sur le rosier sauvage (aubépine ?) a été greffé (par l’un des propriétaires précédents de cette maison : l’Anglais, peut-être ?) un rosier rouge qui offre deux fleurs dans la pure lumière du matin : il y aurait une photo à faire, mais il y a tant de photos à faire ! Ce qu’il y a de sûr, c’est que ce ne sont pas les roses qui sont belles, mais la fusion de ces roses et de la lumière oblique du matin. J’écrirai sans doute un poème sur cet instant. Entre ces roses et le vieux puits, il y a les lys orangés, dont c’est le règne, à présent. C’est le règne aussi des troènes, dont les fleurs blanches diffusent leur parfum tout autour de la maison. Le vieux cerisier, hors d’âge, a donné quelques cerises, dont j’ai goûté une ou deux, à moitié mangées des oiseaux, pas vraiment sucrées. La résine du cerisier perle au bout de ses branches. J’ai scié quelques branches, pour le poêle à bois, l’hiver prochain : combien d’hivers me reste-t-il ?
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Il y a dans le poème de Kipling , « Si… », une phrase (je cite de mémoire) du genre de celle-ci : « si tu peux supporter d’entendre tes paroles / travesties par des gueux… ». Je pense à cette phrase, quand je pense à la façon caricaturale dont on a résumé mes propos dans le journal local, pendant la campagne électorale, à Romilly. Je plaidais pour « une culture populaire de qualité ». Sans doute m’étais-je mal exprimé : je faisais allusion au fait que les classes populaires n’accèdent pas, le plus souvent, à certaines formes de culture « classique » : musique classique, opéra…Et il me semblait indispensable de les y faire accéder.
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Je pense à la librairie « Majuscule » de Romilly, fermée depuis plusieurs mois. Quelques jours avant sa fermeture, j’étais venu dans cette librairie demander une bouteille d’encre. Je faisais des caprices : exigeant que l’on commande, pour moi et pour moi seul, de l’encre « Montblanc » de couleur noire. Les employés me regardèrent avec une tristesse dans le regard que je ne peux oublier : ils savaient, eux, que leur librairie allait fermer, quelques jours plus tard, ce que je ne savais pas. Ils se gardèrent de me le dire.
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Hier, de part et d’autre de la route : des coquelicots, dont l’aspect éphémère me bouleverse, chaque fois.
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Longtemps, l’échec a été en moi. Depuis, je pressens les gens qui sont ce que j’ai été. C’est souvent un sentiments de culpabilité –dont on ignore la cause-- qui fait que l’on se punit, sans cesse, toute sa vie, par l’échec. Parmi les élèves du collège, certains ont une joie de vivre à toute épreuve et d’autres vivent dans une tristesse abyssale. C’est l’amour des parents qui a manqué aux uns et qui surabonde pour les autres, d’où leur joie. Pour fuir la sensation d’échec, on peut fuir au bout du monde : la sensation d’échec nous suit.
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Le sport n’est pas un moyen de construire l’Europe des Nations, ni même la fraternité entre les peuples : victoire et défaite ne seront jamais les fléaux de la balance de la fraternité.
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Jour de braderie dans la petite ville voisine de ma maison : on se croirait trente ans en arrière : les tee-shirts à l’effigie de Che Guevara, la « bimbeloterie », comme disent les Québécois. Puis, soudain, dans un enclos de quatre planches…trois petits cochons, à l’oreille marquée de je ne sais quel code, sur un disque de plastic, et qui fouillaient la paille fraîche, de leur groin…

vendredi 27 juin 2008

Samedi 28 Juin 2008. 6H28

Il y a, dans les Mémoires d'Outre-Tombe, de Chateaubriand, une phrase qui dit ceci : "je ne suis fait ni pour commander, ni pour obéir" -- ou quelque chose d'avoisinant. C'est un peu mon cas, moi aussi, et, pourtant , j'exerce un métier où il me faut, alternativement, commander, et obéir !
De la même façon, en tant que poète, je dois être attentif au surgissement incontrôlable, en moi-même, des mots, à une sorte de foisonnement imprévisible, dans le plus joyeux désordre. Or, j'exerce un métier qui implique de mettre en ordre beaucoup de choses, et d'écrire des "Notes de Service" administratives, qui sont tout le contraire du foisonnement, libre et joyeux, du poème !

mercredi 25 juin 2008

Mercredi 25 Juin 2008.19H 35

La plupart des choses que j’ai écrites autrefois, je ne les écrirais plus aujourd’hui : la sensibilité de l’homme s’émousse et se transforme, comme la pierre, sous l’érosion du temps. Ce que nous avons écrit garde trace de ce que nous fûmes : c’est en cela que, telle une pierre précieuse, la poésie est appelée à traverser la nuit des temps : elle scintillera, pour d’autres que nous, dans bien longtemps. Comme un écho sonore se propage, ou une onde, en cercles concentriques, à la surface de l’eau, quelque chose de nos émotions atteindra le cœur du lecteur, de la lectrice, alors même que nous n’y serons plus.

J’en parle à la lumière de ce que j’ai éprouvé, en lisant les poètes, dans mon adolescence, (et plus particulièrement Guillaume Apollinaire, dont je parlerai, ici, plus longuement, un jour), cette découverte du flamboiement des mots… Maintenant que le temps se resserre, pour moi, il n’est plus temps de craindre le jugement de la postérité sur ce que j’ai écrit : je ne referai pas une œuvre tout entière, mais, comme le vieux luthier qui construit encore et toujours son énième violon, en tenant compte de l’expérience que lui ont donnés tous ses violons précédents, je construirai encore, si Dieu me prête vie, quelque machinerie de mots, apte à produire une musique – que quelques-uns, peut-être, sauront entendre…A moins que ces mots ne se perdent, dans l’indifférence générale, dans le world web wide, comme un objet minuscule se perd dans une immensité.

Mercredi 25 Juin 2008.19H 27

Il y a une phrase de Louis-Ferdinand Céline que je me répète souvent : "l'amour, c'est l'infini, mis à la portée des caniches".

Mercredi 25 Juin 2008.19H22

La dimension théâtrale du sport : Espagne-Italie, les deux équipes pétrifiées par la peur de perdre...La défaite est quelquefois préférable à des victoires où, seul, l'ennui triomphe.

dimanche 22 juin 2008

Dimanche 22 Juin 2008. 16H16

Il faut regarder, sans rire, à la télévision, un documentaire sur le Qatar, commenté d'une voix grave : l'on nous montre des gens faisant du hockey sur glace, alors qu'il fait soixante degrés, à l'ombre, au dehors, et des courses de dromadaires sur lesquels on a fixé des robots en forme de minuscules jockeys, avec un bras télécommandé, armé d'un fouet, bras que dirige à l'aide d'une télécommande, au rythme qui lui convient, le maître du dromadaire qui suit la course, en 4X4, sur une route parallèle à la piste !
--A quoi sert la richesse d'une nation, si le peuple n'y gouverne pas ?

Dimanche 22 Juin 2008. 13H59

Je souris, en lisant les compte-rendus des matchs de l'"Euro 2008", sur internet : le style épique des journalistes donnerait à penser qu'on nous raconte Waterloo , ou Stalingrad, comme si tout l'avenir de la Planète, l'avenir de Nations entières, dépendaient de l'issue du match ! Allons, Messieurs les journalistes, ce n'est qu'un jeu ! Le destin de la Planète se joue certainement quelque part, mais pas là !

Dimanche 22 Juin 2008. 13H53

Il y a un vers d'Aragon qui dit ceci : "triste comme les rois sur leurs photographies". Je viens de voir, sur internet, une photographie de Carla Bruni, première dame de France, vêtue de noir, assise, entre deux drapeaux. Je lui trouve quelque chose de triste, dans le regard. Mais je me trompe peut-être, je me trompe sûrement, je ne fais certainement que projeter, sur tout le monde qui m'entoure, la constante tristesse qui est en moi.

samedi 21 juin 2008

Samedi 21 Juin 2008. 17H35

Il y a, dans La Fontaine, ces vers que je trouve très beaux : "J'aime les jeux , l'amour, les livres, la musique / Il n'est rien / Qui ne me soit souverain bien / Jusqu'au sombre plaisir d'un coeur mélancolique". En me remémorant ces vers si beaux, l'autre jour, il m'a semblé comprendre leur beauté, pour la première fois. J'ai pensé à cette gravure de Dürer : "Melancholia", cet ange aux ailes repliées. J'ai pensé à l'état où je me trouvais en Novembre 2003, à cette sensation de souffrance psychique , qui m'interdisait de savourer "le soleil noir de la mélancolie" (Nerval). Ce "sombre plaisir d'un coeur mélancolique" a un seuil qu'il ne faut pas dépasser, sans quoi, il n'y a plus que la souffrance psychique, qui ne peut se comparer à rien , et dont , seuls, peuvent réellement parler ceux qui l'ont , un jour, une fois, éprouvée.
C 'est vrai , par conséquent, que la mélancolie, si elle reste dans des limites raisonnables, comme une souffrance en sourdine, est un "sombre plaisir", : pour ma part, c'est le prisme le plus quotidien au travers duquel je déchiffre la réalité.
Je suis dans ce "sombre plaisir"-là, que je regarde un match de football, à la télé , avec cette excessive liesse des vainqueurs, et cette excessive tristesse des vaincus. Il faut "aimer les jeux", sans jamais oublier que ce ne sont que des "jeux". Dans mon métier de "Personnel de Direction" d'un établissement scolaire , j'observe, chaque jour, avec la plus grande "mélancolie" , l'incroyable violence qui régit les rapports des élèves entre eux, ainsi que les rapports de certains élèves avec l'ensemble des adultes de "la communauté éducative". On n'imagine pas cette violence-là : peut-être, un jour, écrirai-je un livre là-dessus, s'il me reste des forces, s'il me reste une vie après ma vie professionnelle. Parfois, dans mon métier , heureusement, surgit, à l'improviste, une lueur : l'autre jour, je découvre qu'un élève de 5° va apprendre, l'an prochain, le "chinois", par le Centre National d'Enseignement à Distance. Je trouve cela magnifique, de considérer le monde comme un village planétaire, et de vouloir apprendre la langue de nos voisins chinois.

Samedi 21 Juin 2008. 14H59

J'ai regardé, deux matins de suite, (jeudi 19 Juin et Vendredi 20 Juin), entre 6 H et 7H du matin, la retransmission sur la "Chaîne Parlementaire" de la télévision, des débats sur Sénat au sujet des amendements de la Nouvelle Constitution. Les Sénateurs, débattaient de la présence des mots "race", "langue régionale", dans la Nouvelle Constitution, ou encore du fait de savoir "dans quelles conditions le Parlement devait être informé de l'envoi de troupes françaises à l'étranger". Ce qui m'a ému, c'est que les débats étaient transversaux aux partis politiques : sur l'importance du mot "race" , des sénateurs de droite tombaient d'accord avec des sénateurs de gauche, et réciproquement, et ne s'opposaient plus selon le parti politique auxquels ils appartenaient, mais selon leur intime conviction. On sentait , dans l'hémicycle , le souffle de la République, celui des philosophes du Siècle des Lumières : Diderot, Rousseau, Voltaire... Le Président du Sénat, Christian Poncelet, soudain, s'est levé , a reboutonné sa veste, et a souhaité la bienvenue à une délégation de l'Assemblée nationale du Viet-nam. Tout cela n'était pas sans grandeur.
En regardant tout cela, je me suis demandé si cela me plairait d'être Sénateur moi-même, mais, presque aussitôt, je songeai aux heures qu'il faut passer, assis là, à écouter des discours, alors que je me vois plutôt , dans quelques années, herborisant comme le Jean-Jacques Rousseau des Rêveries du Promeneur Solitaire.

mercredi 18 juin 2008

Mercredi 18 Juin 2008. 16H25

Depuis des années, je songe à écrire un texte sur le peintre Nicolas De Staël. Peut-être n'écrirai-je que quelques lignes, ou quelques pages. Ces lignes, ces pages s'intituleraient "Les Remparts d'Antibes". C'est dire que ce texte parlerait d'abord de la mort de De Staël, de cette ultime seconde, où ce génie (pour qui, pour quoi ? ) s'est précipité du haut des remparts d'Antibes. C'est dire que ce texte parlerait de ce degré de souffrance psychique qu'il faut atteindre, pour faire un tel geste. C'est dire aussi que je crois que la Mort peut porter un éclairage rétrospectif sur toute une vie . Que serait Dom Juan , sans la chute, sans la rencontre avec la statue du Commandeur ?

Mercredi 18 Juin 2008. 16H10

Je ne peux lire Du Bellay (Les Antiquités de Rome, Les Regrets) sans penser que ses textes, vieux de quatre siècles, pourraient avoir été écrits par un poète-frère, dans la pièce d'à côté, et qui viendrait, tout juste après l'avoir écrit, vous montrer son texte, dont l'encre n'aurait pas eu le temps de sécher. De quoi est donc fait le coeur de l'homme, de quel granit, quel diamant, pour être ainsi immuable, de siècle en siècle ?

mardi 17 juin 2008

Mardi 17 Juin 2008. 20H17

Quelqu'un, parlant de Gandhi, à la télévision, l'a qualifié de "renonçant". Le mot m'a plu. Je me suis dit : c'est peut-être en renonçant que l'on obtient : en renonçant au pouvoir, dans le domaine politique, en renonçant à la gloire , dans le domaine littéraire, en renonçant à la satisfaction de ses désirs, dans le domaine amoureux. C'est ce que les psychiatres et autres psychanalystes nomment le "lâcher-prise".
Il s'agit peut-être de renoncer, avant que tout ne s'effondre : Napoléon , avant la campagne de Russie, avant Waterloo, Dom Juan avant que la statue du Commandeur ne vienne lui serrer la main et ne l'entraîne vers les flammes de l'enfer...

dimanche 15 juin 2008

Dimanche 15 Juin 2008. 12H20

J'ai lancé un débat sur mon site internet politique http://www.depositairesdelesperance.tk/, au sujet de la stratégie politique à suivre, pour favoriser la victoire de la gauche, à toutes les prochaines échéances électorales : locales, régionales, nationales. Par ailleurs, j'ai suivi, hier, en direct, sur La Chaîne Parlementaire, les débats de la Convention Nationale du Parti Socialiste, à la Cité des Sciences, à Paris, concernant la "Déclaration de Principes " qui a été adoptée, hier. Ce matin , j'ai envoyé un e-mail à Jean-Luc Mélenchon, sur son blog, pour solliciter de lui une contribution au débat que je lance sur mon site internet politique. Répondra-t-il ?
J'ai conçu pour Jean-Luc Mélenchon une grande admiration, depuis le temps où il était Ministre chargé de l'Enseignement Professionnel, et moi, Proviseur d'un Lycée Professionnel Industriel.

mercredi 11 juin 2008

Mercredi 11 Juin 2008. 18H48

Je ne transformerai pas en slam ma poésie, comme on entend que font aujourd'hui les chanteurs sur les ondes, disant en mille mots ce qui peut être dit en deux ou trois mots seulement.
Tout au contraire, j'irai vers toujours plus de dépouillement, partant à la recherche du reflet doré de la lune à la surface de l'étang, jusqu'à ce que , me penchant, moi aussi, depuis ma barque, pour cueillir , moi aussi, ce reflet, comme fit, autrefois, le poète chinois, je finisse , tout comme lui, par basculer dans l'eau de cet étang.

samedi 7 juin 2008

Dimanche 8 Juin 2008. 7H55

Mis en ligne, ce matin, onze poèmes de Fin de Siècle, sur mon site de poèmes, hébergé gratuitement par Google . J'ai renoncé à publier sur le World Wide Web certains poèmes que j'avais imprimés dans l'édition sauvage (samizdat) réalisée à quelques exemplaires , en l'an 2000, à Charmes, dans les Vosges. En effet , pour un écrivain, se relire, c'est, un peu, comme se regarder dans le miroir : il y a des jours où l'on se satisfait de son visage, dans le miroir, et d'autres jours, pas du tout. C'est un peu la même chose dans l'écriture : on se demande, soudain, à la relecture, des années après, comment on a pu laisser publier tel ou tel texte.
J'ai écrit également, et publié, hier, 7 Juin 2008, sur mon site "politique", Dépositaires de l'Espérance, un texte intitulé "Perplexité"(1), que je juge important, et auquel je renvoie le lecteur, la lectrice de ce blog.

dimanche 1 juin 2008

Dimanche 1 Juin 2008. 8H46

Dans ma maison, en Lorraine…Le tour du jardin : en contrebas, la décrue : les bords de la rivière ont repris leur aspect habituel : l’arbre frêle dont je parlais, hier, a survécu : il garde, cependant, un air penché, des combats qu’il a menés, la veille. Les très vieux saules, eux, ont vécu cette crue avec indifférence, comme des dizaines d’autres : ce sont eux qui empêchent la rivière d’arracher la terre du talus qui la surplombe, sur la rive qui « m’appartient » --possède-t-on quoi que ce soit, ici-bas ? Près du massif de lavande, les toiles d’araignées, recouvertes d’infimes gouttelettes d’eau, semblaient de la guipure.

Neuf heures sonnent, au clocher de l’église :

« Le temps s’en va, le temps s’en va, Madame

Las ! Le temps, non, mais nous nous en allons… »

Un bœuf meugle, quelque part. D’autres lui répondent. Il y a comme un vent de révolte, ce matin, parmi le bétail, d’habitude paisible, dans les prés voisins. Quelle que soit la banalité de chacune de nos journées, elle a son unicité : nous voyageons sur l’aile du temps : comme le jardin, qui traverse les saisons de l’année : chaque fleur y attend son heure d’apothéose et de déclin : l’heure des tulipes, l’heure des pivoines, l’heure des lys…Comme nous traversons les saisons de notre vie, en attendant, nous aussi, notre heure d’apothéose et de déclin, en oubliant, le plus souvent, qu’il est « plus tard que nous ne le pensons. ». Impassible, la vigne vierge envahit le mur, côté jardin, comme chaque année : ce ne sont pas les mêmes feuilles, mais le même pied de vigne, qui chaque année, part à la reconquête de son espace, en grimpant jusque sous le toit, en attendant la torpeur de l’été, à quoi succédera l’automne, qui fera flamboyer les feuilles, et le vent d’hiver, qui les emportera, faisant se succéder, d’un même souffle, l’apothéose et le déclin.

Dans le pré qui jouxte mon jardin, il y a de jeunes bœufs, au pelage brun, uni, qui broutent innocemment, sans savoir qu’ils sont condamnés à l’abattoir. Je les regardais, depuis l’espèce de tonnelle avec de petites colonnades blanches, dans le style hellénisant, que mon lointain prédécesseur, dans cette maison, un Anglais, avait construit, sans doute, de ses propres mains : j’ai retrouvé des moules, pouvant servir à cela, dans la cave. Dans les archives de la maison, au fond d’un placard, il y avait, aussi, d’anciennes demandes de permis de construire de ce propriétaire anglais : l’adresse postale, à laquelle la préfecture du département français où je me trouve, lui répondait, m’a fait sourire : en guise de nom de rue, avant le nom du village, simplement ce mot anglais : « Riverside », « bord de la rivière ».

J’ai accroché, dans l’escalier qui mène au premier étage de ma maison, la reproduction d’un tableau d’Emile FRIANT (1863-1932). L’original de ce tableau, Les Amoureux (1888), une huile sur toile (110, 145 cm), se trouve au Musée des Beaux-Arts de Nancy (Meurthe-et-Moselle). Dans ce tableau, deux amoureux, au premier plan, peints de dos, accoudés au parapet métallique d’un pont qui surplombe une rivière, que l’on voit dans l’arrière-plan du tableau, ainsi qu’un autre pont , de pierre, celui-là, dialoguent silencieusement, par la seule force de leur regard.

Samedi 31 Mai 2008. 18H35

Dans ma maison, en Lorraine. Levé à 9H : en contrebas du jardin, la rivière est en crue, et charrie une eau boueuse, avec force. Il a un tout jeune arbre, encore frêle, qui a poussé, par hasard, au bord de cette rivière , et qui se trouve englouti par un mètre d’eau , et s’agite , sous la force des flots. Il semble qu’à tout instant les flots vont l’emporter… En regardant cette rivière en crue, impressionnante, je ne peux m’empêcher de penser à ces vers de Du Bellay, dans les Antiquités de Rome :

« Comme on passe, en été, le torrent sans danger

Qui soulait en hiver être roi de la plaine »

C’est vrai qu’au plus chaud de l’été, le niveau de la rivière est très bas et les nénuphars à fleurs jaunes ont tout juste assez d’eau pour y fleurir.

Fait, ce matin, le tour du jardin : impressionnantes fleurs blanches du sureau, étincelantes des gouttes de pluie de la nuit passée, le rosier sous le sapin n’a qu’une rose ouverte, une sorte de rose avec peu de pétales et qui ressemble à la rose de Provins. La lavande, près du vieux puits, semble annoncer une assez bonne floraison. Le cerisier porte des cerises encore vertes, le pommier des pommes petites comme des billes. Le rosier aux roses jaunes se sert du lierre mort, pour escalader le mur…

Scié, cet après-midi, du bois, empilé des bûches, à l’intérieur de la véranda.

Sur mon site internet de poèmes, j’ai mis le point final au recueil intitulé « Le ciel est couleur d’encre » : on sent, à l’intérieur de soi, que les pages des poèmes d’une certaine tonalité sont tournée, et qu’une autre saison s’ouvre, en vous. Je mets en ligne, à présent, une suite de poèmes nouveaux, dont j’ai écrit le premier aujourd’hui même, sous le titre de « Force de la douceur », tout en poursuivant la mise en ligne, commencée, il y a plusieurs semaines, des poèmes de « Fin de Siècle ».