mercredi 25 novembre 2009

Jeudi 26 Novembre 2009. 6H25

Quelle plus belle évocation de l'amour fusionnel, que celle que l'on trouve à la page 256 de l'édition des Classiques Garnier ( Imprimerie Tardy Quercy, Bourges, 1980) des Confessions de Rousseau : "Nous commençâmes , sans y songer, à ne plus nous séparer l'un de l'autre, à mettre en quelque sorte notre existence en commun, et sentant que réciproquement nous nous étions non seulement nécessaires, mais suffisants, nous nous accoutumâmes à ne plus penser à rien d'étranger à nous, à borner absolument notre bonheur et tous nos désirs à cette possession mutuelle, et peut-être unique parmi les humains, qui n'était point, comme je l'ai dit, celle de l'amour, mais une possession plus essentielle , qui, sans tenir aux sens, au sexe, à l'âge, à la figure, tenait à tout ce par quoi l'on est soi, et qu'on ne peut perdre qu'en cessant d'être."

lundi 24 août 2009

Lundi 24 Août 2009.

"La vie ambulante est ce qu'il me faut." (Jean-Jacques Rousseau, Les Confessions, éditions des Classiques Garnier, 1980, p. 195) : que disent d'autre tous les "road stories", tous les "road movies" d'aujourd'hui ?

jeudi 13 août 2009

Jeudi 13 Août 2009. 15H07.

Romilly-Sur-Seine.

"Ils ont en effet le sentiment qu'ils vous témoignent ; mais ce sentiment s'en va comme il est venu. En vous parlant ils sont pleins de vous ; ne vous voient-ils plus, ils vous oublient. Rien n'est permanent dans leur coeur : tout est chez eux l'oeuvre du moment." ( Confessions, p. 181, op.cit). C'est ainsi que Rousseau s'exprime à propos des "Français",--et je ne trouve pas que cela soit tout-à-fait faux...Bien que je sois d'une origine cosmopolite (polonaise, allemande, française), ai-je cela en commun avec les "Français" ?
*
"La chose que je regrette le plus dans les détails de ma vie dont j'ai perdu la mémoire est de n'avoir pas fait des journaux de mes voyages. Jamais je n'ai tant pensé, tant existé, tant vécu, tant été moi, si j'ose ainsi dire, que dans ceux que j'ai faits seul à pied. La marche a quelque chose qui anime et avive mes idées : je ne puis presque penser quand je reste en place ; il faut que mon corps soit en branle pour y mettre mon esprit." (p. 183, op.cit.) Cette phrase est très moderne, ou plutôt elle est éternelle : combien de philosophes, de l'Antiquité à nos jours, ont pensé en marchant ?
*
"Si pour les fixer je m'amuse à les décrire en moi-même, quelle vigueur de pinceau, quelle fraîcheur de coloris, quelle énergie d'expression je leur donne ! On a, dit-on, trouvé de tout cela dans mes ouvrages, quoique écrits vers le déclin de mes ans. Oh ! si l'on eût vu ceux de ma première jeunesse, ceux que j'ai faits durant mes voyages, ceux que j'ai composés et que je n'ai jamais écrits !...Pourquoi, direz-vous, ne les pas écrire ? Et pourquoi les écrire ? vous répondrai-je : pourquoi m'ôter le charme actuel de la jouissance, pour dire à d'autres que j'avais joui ? Que m'importaient des lecteurs, un public, et toute la terre, tandis que je planais dans le ciel ? D'ailleurs, portais-je avec moi du papier, des plumes ? Si j'avais pensé à tout cela, rien ne me serait venu. Je ne prévoyais pas que j'aurais des idées ; elles viennent quand il leur plaît, non quand il me plaît. Elles ne viennent point, ou elles viennent en foule ; elles m'accablent de leur nombre et de leur force. Dix volumes par jour n'auraient pas suffi. Où prendre du temps pour les écrire ? En arrivant je ne songeais qu'à bien dîner ; en partant je ne songeais qu'à bien marcher. Je sentais qu'un nouveau paradis m'attendait à la porte ; je ne songeais qu'à l'aller chercher." (p. 184, op.cit.).
Si l'on oppose ces lignes aux lignes du paragraphe précédent , on voit que Rousseau ne regrette en rien de ne pas avoir écrit au cours de ces voyages, ou plutôt on voit qu'il démontre qu'il lui était impossible d'écrire, que le geste très concret et matériel de l'écriture aurait nui à la survenue des idées, qui "viennent quand il leur plaît". Et puis surtout s'il avait voulu évoquer le "stream of consciousness" ainsi que l'a fait Joyce dans Ulysse, "dix volumes par jour n'aurait pas suffi". On voit que la réflexion de Rousseau rejoint toute la problématique de la littérature contemporaine.
*
"Jamais je n'ai si bien senti tout cela que dans le retour dont je parle. En venant à Paris, je m'étais borné aux idées relatives à ce que j'y allais faire. Je m'étais élancé dans la carrière où j'allais entrer, et je l'avais parcourue avec assez de gloire : mais cette carrière n'était pas celle où mon coeur m'appelait, et les êtres réels nuisaient aux êtres imaginaires. Le colonel Godard et son neveu figuraient mal avec un héros tel que moi. Grâce au ciel, j'étais maintenant délivré de tous ces obstacles : je pouvais m'enfoncer à mon gré dans le pays des chimères, car il ne restait que cela devant moi. Aussi je m'y égarai si bien, que je perdis réellement plusieurs fois ma route ; et j'eusse été fort fâché d'aller plus droit, car sentant qu'à Lyon j'allais me retrouver sur la terre, j'aurais voulu n'y jamais arriver. (p. 184, op. cit). Lecteur, entends-tu cela : "les êtres réels nuisaient aux êtres imaginaires". Chaque écrivain, à travers les siècles, n'est-il pas en proie à cette inavouable préférence pour les "êtres" nés de son imagination ?
*
"C'est une chose bien singulière que mon imagination ne se monte jamais plus agréablement que quand mon état est le moins agréable, et qu'au contraire elle est moins riante lorsque tout rit autour de moi. Ma mauvaise tête ne peut s'assujettir aux choses. Elle ne saurait embellir, elle veut créer. Les objets réels s'y peignent tout au plus tels qu'ils sont ; elle ne sait parer que les objets imaginaires. Si je veux peindre le printemps, il faut que je sois en hiver ; si je veux décrire un beau paysage, il faut que je sois dans des murs ; et j'ai dit cent fois que si jamais j'étais mis à la Bastille, j'y ferais le tableau de la liberté.( p.194, op. cit.). Comment dire mieux la nécessité du décalage absolu entre sa vie réelle et sa vie rêvée, pour celui qui tient la plume ?
*
A travers les lignes qui précédent , on voit l'extraordinaire modernité de ce livre écrit au milieu du XVIII° siècle.

mercredi 12 août 2009

Mercredi 12 Août 2009. 17H45

Evoquant Mme de Warens, que , fort étrangement, il nomme "Maman", Rousseau écrit : "Mon attachement pour elle, quelque vif, quelque tendre qu'il fût, ne m'empêchait pas d'en aimer d'autres ; mais ce n'était pas de la même façon. Toutes devaient également ma tendresse à leurs charmes ; mais elle tenait uniquement à ceux des autres, et ne leur eût pas survécu ; au lieu que maman pouvait devenir vieille et laide sans que je l'aimasse moins tendrement." (Confessions, éditions des Classiques Garnier, 1980, p. 167).
Quelle plus belle façon d'évoquer l'amour pur , celui qui, précisément, fait que l'on aime après que celle que l'on a aimée fut devenue "vieille et laide"?
Quelques lignes plus loin, il précise : "Je ne l'aimais ni par devoir, ni par intérêt, ni par convenance ; je l'aimais parce que j'étais né pour l'aimer. Quand je devenais amoureux de quelque autre, cela faisait distraction, je l'avoue, et je pensais moins souvent à elle ; mais j'y pensais avec le même plaisir, et jamais, amoureux ou non, je ne me suis occupé d'elle sans sentir qu'il ne pouvait y avoir pour moi de vrai bonheur dans la vie tant que j'en serais séparé." (p. 168, op. cit.)
Voilà ce que la belle langue du XVIII° fait de mieux , dans un style étincelant de force et de simplicité : "je l'aimais parce que j'étais né pour l'aimer". Ou encore : "il ne pouvait y avoir pour moi de vrai bonheur dans la vie tant que j'en serais séparé."

vendredi 7 août 2009

Vendredi 7 Août 2009.

Romilly-Sur-Seine. 15H13.
Comment ne pas parler, au cours de ma relecture des Confessions de Rousseau , de ces pages absolument sublimes du "Livre Quatrième" qui, dans l'édition des Classiques Garnier (1980), s'étendent de la page 149 ("L'aurore un matin...") à la page 154 ("...en commençant tout au moins par là").
Quand il évoque cette belle journée de ses dix-huit ans, Rousseau a cinquante-quatre ans, il séjourne à Wootton, en Staffordshire : c'est aussi la magie de l'écriture que de ressusciter un passé vieux de trente-six ans.
Ces cinq pages ne font qu'évoquer les émois amoureux d'un jeune homme de dix-huit ans, mais, à mes yeux , elles sont plus importantes que le récit de je ne sais quel fait d'armes prestigieux, sous la plume d'un autre écrivain que Rousseau.
Cette journée de fin Juin , début Juillet 1730, près d'Annecy, se trouve éternisée, par la plume de Jean-Jacques.

jeudi 6 août 2009

Jeudi 6 Août 2009. 18H50.

"Connaître son être" : quelle fastueuse expression ! On la trouve sous la plume de Rousseau : "Me voilà donc enfin établi chez elle. Cet établissement ne fut pourtant pas encore celui dont je date les jours heureux de ma vie, mais il servit à le préparer. Quoique cette sensibilité de coeur, qui nous fait vraiment jouir de nous, soit l'ouvrage de la nature et peut-être un produit de l'organisation, elle a besoin de situations qui la développent. Sans ces causes occasionnelles, un homme né très sensible ne sentirait rien et mourrait sans avoir connu son être." (Les Confessions, p. 114, op. cit.).
Rousseau montre bien qu'une rencontre peut avoir un rôle de catalyseur : " Tel à peu près j'avais été jusqu'alors, et tel j'aurais toujours été peut-être, si je n'avais jamais connu Mme de Warens, ou même si, l'ayant connue, je n'avais pas vécu assez longtemps auprès d'elle pour contracter la douce habitude des sentiments affectueux qu'elle m'inspira." (p. 114, op. cit.). Il est des rencontres qui vous ouvrent une éclaircie dans le coeur.

Jeudi 6 Août 2009.

Romilly-Sur-Seine (Aube). 15H16.
Au milieu du XVIII° Siècle, Jean-Jacques Rousseau écrit une langue qui s'est perdue aujourd'hui, --ce dont bien me fâche.
Dans le "Livre Troisième" des Confessions, à la page 117 de l'édition des Classiques Garnier (achevé d'imprimer par l'imprimerie Tardy Quercy S.A., à Bourges, le 10 Avril 1980), à propos de la rencontre de Jean-Jacques et de Mme de Warens, on lit ceci : "Le coup d'oeil de notre première entrevue fut le seul moment vraiment passionné qu'elle m'ait jamais fait sentir; encore ce moment fut-il l'ouvrage de la surprise." . On pense à la rencontre de Frédéric et d' une jeune femme, dans l'Education Sentimentale, qui se conclut par ces mots qui sont l'alpha et l'oméga de tout : "leurs yeux se rencontrèrent". Mais , ici , le regard passionné tient lieu de début et de fin à la passion : "le seul moment passionné". Se lit aussi le poids des contraintes sociales, le poids de la morale : il faut que "la surprise" bouleverse les gestes et les attitudes que doit s'imposer, en tous temps et tous lieux , Mme de Warens, pour rester fidèle aux règles de sa condition.
Et puis , sous la plume de Rousseau, vient cette phrase : "Je n'avais ni transports ni désirs auprès d'elle; j'étais dans un calme ravissant, jouissant sans savoir de quoi." (p. 117, op cit.) . A-t-on mieux défini l'extase, la transcendance d'une émotion, au-delà du désir ? Cette extase profonde, qui vous transporte, abolit le temps et la durée, parce que, tout simplement, on est passé au-delà de leurs rivages : "J'aurais ainsi passé ma vie et l'éternité même sans m'ennuyer un instant." (p. 117, op.cit.).
Toute grande émotion nous donne, en effet, un avant-goût de l'éternité : c'est ce que Rousseau démontre, en quelques mots.

mercredi 22 avril 2009

Jeudi 23 Avril 2009. 6H46

Jean-Jacques Rousseau, ayant quitté Genève, rencontre Madame de Warens à Annecy, puis parvient à Turin à "l'Hospice des Catéchumènes", lieu où l'on menait ceux qu'on s'apprêtait à convertir à la religion catholique. Mais quel regard impitoyable jette Jean-Jacques sur ses condisciples ! " Dans cette salle d'assemblée étaient quatre ou cinq affreux bandits, mes camarades d'instruction, et qui semblaient plutôt des archers du diable que des aspirants à se faire enfants de Dieu."(Les Confessions, édition des Classiques Garnier , 1980, p. 66).
Le regard qu'il jette sur ses condisciples de sexe féminin est encore plus impitoyable :"Par cette porte entrèrent nos soeurs les catéchumènes, qui s'allaient régénérer, non par le baptême, mais par une solennelle abjuration. C'étaient bien les plus grandes salopes et les plus vilaines coureuses qui jamais aient empuanti le bercail du Seigneur." (p. 66, op. cit.)
J'aime cette virulence de Jean-Jacques, qui , par ailleurs, est capable d'un style très compassé. Par ailleurs, il ne faut pas être grand clerc pour voir dans ces lignes une critique de la religion catholique, qui se contentaient de conversions bien superficielles et qui ne pouvaient tromper personne, pour augmenter, de façon bien illusoire, on le voit, le nombre de ses "fidèles".

dimanche 12 avril 2009

Lundi 13 Avril 2009

Comment ne pas reconnaître une parole fraternelle dans toutes ces phrases de Jean-Jacques Rousseau : "J'ai des passions très ardentes, et tandis qu'elles m'agitent, rien n'égale mon impétuosité : je ne connais plus ni ménagement, ni respect, ni crainte, ni bienséance; je suis cynique, effronté, violent, intrépide; il n'y a ni honte qui m'arrête, ni danger qui m'effraye : hors le seul objet qui m'occupe, l'univers n'est plus rien pour moi. Mais tout cela ne dure qu'un moment, et le moment qui suit me jette dans l'anéantissement." ( Les Confessions, p. 38, édition des Classiques Garnier, 1980).
Ou encore : "Si mon sang allumé me demande des femmes, mon coeur ému me demande encore plus de l'amour. Des femmes à prix d'argent perdraient pour moi tous leurs charmes; je doute même s'il serait en moi d'en profiter. Il en est ainsi de tous les plaisirs à ma portée; s'ils ne sont gratuits, je les trouve insipides. J'aime les seuls biens qui ne sont à personne qu'au premier qui sait les goûter." (p. 39, op.cit.)
Ou bien encore : "Au fort d'une certaine habitude d'être, un rien me distrait, me change, m'attache, enfin me passionne; et alors tout est oublié, je ne songe plus qu'au nouvel objet qui m'occupe." (p. 42, op.cit).
Je ne peux, décidément, relire Rousseau sans ressentir la formidable émotion qui s'empara de moi, lorsque je le lus la première fois :"Dans cette étrange situation, mon inquiète imagination prit un parti qui me sauva de moi-même et calma ma naissante sensualité; ce fut de se nourrir des situations qui m'avaient intéressé dans mes lectures, de les rappeler, de les varier, de les combiner, de me les approprier tellement que je devinsse un des personnages que j'imaginais, que je me visse toujours dans les positions les plus agréables selon mon goût, enfin que l'état fictif où je venais à bout de me mettre, me fit oublier mon état réel dont j'étais si mécontent. Cet amour des objets imaginaires et cette facilité à m'en occuper achevèrent de me dégoûter de tout ce qui m'entourait, et déterminèrent ce goût de la solitude qui m'est toujours resté depuis ce temps-là." (p. 43 et 44, op. cit).

vendredi 6 mars 2009

Vendredi 6 Mars 2009. 18 H 59

Il y a des phrases écrites il y a deux cent cinquante ans , mais qui auraient pu avoir été écrites et mises en ligne , il y a trois minutes , par n'importe quel "blogueur", sur internet :"Je sais bien que le lecteur n'a pas grand besoin de savoir tout cela, mais j'ai besoin, moi , de le lui dire ." (Jean-Jacques Rousseau, édition des Classiques Garnier, 1980, p. 22). Toute la thérapie de l'écriture est là, aussi, comme son "plaisir" : "Que n'osé-je lui raconter toutes les petites anecdotes de cet heureux âge ...j'en veux une, une seule, pourvu qu'on me la laisse conter le plus longuement qu'il me sera possible, pour prolonger mon plaisir." (p. 22, op. cit.)

jeudi 5 mars 2009

Jeudi 5 Mars 2009. 16H06

J'entreprends la relecture des Confessions de Jean-Jacques Rousseau, dans l'édition des Classiques Garnier ( édition de Jacques Voisine, Professeur à la Sorbonne, 1980). Ce sera, au moins, ma troisième lecture. Ma première lecture de cet ouvrage, à dix-sept ans, c'était dans une édition du Livre de Poche, que j'aimerais retrouver.
Une première lecture, c'est toujours une découverte, où tout a de l'importance : l'aspect physique du livre, le grain du papier, la dimension des caractères d'imprimerie...Je n'ai pas oublié, par exemple, l'édition du Livre de Poche des Poèmes d'Apollinaire, ou des Fleurs du Mal, celle, chez Folio, du Procès de Kafka, celle , chez Seghers, des Derniers Poèmes d'Amour d'Eluard, que mon père jeta dans le feu, quand j'étais lycéen, déclarant que ma passion de la poésie nuisait à mes études.
Le texte des Confessions, dès les premières lignes, me semble familier et --oserai-je le dire ?-- fraternel, tant ma sensibilité est proche de celle de Jean-Jacques. Evoquant sa formation intellectuelle, dès l'enfance, au travers de ses lectures , Rousseau écrit : "De ces intéressantes lectures, des entretiens qu'elles occasionnaient entre mon père et moi, se forma cet esprit libre et républicain, ce caractère indomptable et fier, impatient de joug et de servitude, qui m'a tourmenté tout le temps de ma vie dans les situations les moins propres à lui donner essor." (p. 8 et 9, op. cit.).
J'admire le rythme de la phrase de Rousseau, rythme sans doute inégalé, ces symétries destinées à donner encore plus de force à ce qui est écrit.

mercredi 4 mars 2009

Jeudi 5 Mars 2009. 8H18

Incroyable modernité des questions soulevées par Chateaubriand, en 1841, quand on pense à tous les nouveaux pauvres d'aujourd'hui , dans les pays "capitalistes", en 2009 : " Un état politique où des individus ont des millions de revenu, tandis que d'autres meurent de faim, peut-il subsister quand la religion n'est plus là, avec ses espérances hors de ce monde, pour expliquer le sacrifice ?" (Mémoires d'Outre-Tombe, IV, Flammarion Grand Format, 1982, p. 581).
*
* *
Et que dire de cette merveilleuse phrase sur "l'infini" , où se trouve, exprimé en quelques mots, tout le travail du poète: " L'homme n'a pas besoin de voyager pour s'agrandir ; il porte avec lui l'immensité. Tel accent échappé de votre sein, ne se mesure pas, et trouve un écho dans des milliers d'âmes : qui n'a point en soi cette mélodie, la demandera en vain à l'univers. Asseyez-vous sur le tronc de l'arbre abattu au fond des bois ; si dans l'oubli profond de vous-même, dans votre immobilité, dans votre silence, vous ne trouvez pas l'infini, il est inutile de vous égarer aux rives du Gange." (p. 587, Flammarion, IV, op. cit.) .
*
* *
Et encore cette phrase, qui relativise l'importance de la littérature : "Le plus beau livre de la terre, ne vaut pas un acte inconnu de ces martyrs sans nom dont Hérode avait mêlé le sang à leurs sacrifices" (p. 600 et 601, Flammarion, IV, op. cit.)
*
* *
Et enfin, cette phrase ultime, qui clôt les Mémoires d'Outre-Tombe : "Je vois les reflets d'une aurore dont je ne verrai pas se lever le soleil. Il ne me reste qu'à m'asseoir au bord de ma fosse, après quoi, je descendrai hardiment le Crucifix à la main, dans l'Eternité." (p. 606, op. cit.). Dans cette phrase, la mort n'est pas chasseresse (voir l'image du "Grand Veneur de la Mort", Mémoires d'Outre-Tombe, II, Classiques de Poche, 2003, p. 543), elle n'est pas prédatrice , comme dans la phrase concernant la mort de Talleyrand ("la mort le cherchait de la part de Dieu et elle l'a enfin trouvé", Flammarion, IV, p. 566, op. cit.). Dans la dernière phrase dont le rythme, la cadence sont soigneuseusement étudiés (syllabes réparties en groupes réguliers : 5, 3 ,5, 3, 4, 3, 4, 3, 5), on assiste à une théâtralisation de la mort : c'est Chateaubriand qui, loin de subir la mort, comme d'autres, va vers elle, "hardiment" : quelque part, la seule façon de vaincre la mort, sans doute, c'est de l'accepter "hardiment". Chateaubriand est muni, pour seule arme, pour seul viatique, d'un "Crucifix", c'est-à-dire de sa croyance, réaffirmée ici, en un "christianisme catholique" ("je ne trouve de solution à l'avenir que dans le christianisme, et dans le christianisme catholique", Flammarion, IV, p. 596, op. cit.).
Le mot "Eternité" n'annonce pas une fin, mais le début d'une immensité.
On pense à Rimbaud :
"Elle est retrouvée
Quoi ? l'éternité
C'est la mer allée
Avec le soleil".
*
* *
Je viens d'achever, en ce 5 Mars 2009, à huit heures du matin, la lecture des trois mille pages des Mémoires d'Outre-Tombe, lecture sans cesse commencée, puis abandonnée, puis reprise, depuis vingt ans...J'avais acheté le tome IV des Mémoires dans l'édition Flammarion Grand Format (1982), il y a vingt ans, bientôt, le 28 Juin 1989, à Laxou (Meurthe-et-Moselle) , en perspective de la préparation de l'Agrégation de Lettres Modernes (1990) . Le sujet de la Composition Française, d'une durée de sept heures, devait être , en cette année 1990 : "Chateaubriand écrit dans les Mémoires d'Outre-Tombe (quatrième partie, II, 13) : "Ma mémoire oppose sans cesse mes voyages à mes voyages, montagnes à montagnes, fleuves à fleuves, forêts à forêts, et ma vie détruit ma vie. Même chose m'arrive à l'égard des sociétés et des hommes." Dans quelle mesure cette réflexion du mémorialiste éclaire-t-elle votre lecture de la quatrième partie des Mémoires d'Outre-Tombe ?" Ce sujet , je le comprends aujourd'hui, consistait à montrer les Mémoires, écrits en trente ans, comme un immense palimpseste.
Toujours est-il que j'échouai à l'Agrégation de 1990 (comme à toutes mes autres candidatures à ce concours). Il était écrit que je ne devais jamais "m'agréger" à cette troupe d'élus. Tout ce que j'écris aujourd'hui n'est-il pas une façon, bien dérisoire, de compenser mes échecs à ladite Agrégation ? L'Agrégation ce sera, pour moi, dans une autre vie : il me reste, auparavant, à présent, à moi aussi, à descendre, "hardiment" , " dans l'Eternité" .


Mercredi 4 Mars 2009. 15H02

En une auto-dérision feinte, par antiphrase, Chateaubriand parle ainsi, caricaturalement, de lui-même : "Je raisonne ici, je le sais, en homme dont la vue bornée n'embrasse pas le vaste horizon humanitaire, en homme rétrograde attaché à une morale qui fait rire ; morale caduque du temps jadis, bonne tout au plus pour des esprits sans lumière, dans l'enfance de la société". ( Mémoires d'Outre-Tombe, IV, Editions Flammarion Grand Format, 1982, p. 552).
*
* *
Phrase qui donne à méditer, que celle-ci : "En même temps qu'il faut mettre une faculté rare, mais trop flexible, en garde contre des bêtises supérieures, il faut aussi la prévenir que les écrits de fantaisie, les peintures intimes (comme cela se jargonne), sont bornés, que leur source est dans la jeunesse, que chaque instant en tarit quelques gouttes, et qu'au bout d'un certain nombre de productions, on finit par des répétitions affaiblies." (p. 553, op. cit.). Il est sûr que je ne pourrais plus écrire, aujourd'hui, ce que j'écrivais à vingt ans , dont la "source" était "dans la jeunesse". J'espère, tout du moins , n'en n'être pas réduit, à présent, à "des répétitions affaiblies".
*
* *
Et que dire de cette fulgurance : "Notre espèce se divise en deux parts inégales : les hommes de la mort et aimés d'elle ; troupeau choisi qui renaît ; les hommes de la vie et oubliés d'elle ; multitude de néant qui ne renaît plus." (p. 565 , op. cit.) Le paradoxe est ainsi absolu : seuls survivent "les hommes de la mort".
*
* *
Pour se convaincre que le le personnage métaphorique de la Mort traverse, de part en part, tout le texte des Mémoires d'Outre-Tombe , il suffit de relire ceci : "M. de Talleyrand appelé de longue date au tribunal d'en haut, était contumax ; la mort le cherchait de la part de Dieu, et elle l'a enfin trouvé." (p. 566, op. cit.)
*
* *
Autre personnage métaphorique, magnifiquement mis en scène : le malheur. Ainsi : "Le malheur qui se perpétue produit sur l'âme l'effet de la vieillesse sur le corps ; on ne peut plus remuer ; on se couche. Le malheur ressemble encore à l'éxécuteur des hautes justices du ciel : il dépouille les condamnés, arrache au roi son sceptre, au militaire son épée ; il ôte le décorum au noble, le coeur au soldat, et les renvoie dégradés dans la foule." (p. 570, op. cit.).
*
* *
Enfin, Chateaubriand nous renvoie à la quête de notre identité profonde, à la superficialité, à l'insignifiance, même, de nos destins individuels : "Notre orgueil se met en colère à la seule exposition de ces magnifiques tapisseries du Louvre ; des Ombres, même des broderies d'Ombres nous choquent. Inconnus ce matin, plus inconnus ce soir, nous ne nous en persuadons pas moins que nous effaçons ce qui nous précéda : et toutefois chaque minute en fuyant nous demande : "Qui es-tu ?" et nous ne savons que répondre. " (p. 572, op. cit.)



mardi 24 février 2009

Mercredi 25 Février 2009. 8H58

Concernant le journaliste républicain et athée Armand Carrel, qui vient de mourir en duel en 1836, à trente-six ans, Chateaubriand, "royaliste et chrétien", écrit ces lignes sublimes : "Beaucoup de Rois, de Princes, de Ministres, d'hommes qui se croyaient puissants ont défilé devant moi : je n'ai pas daigné ôter mon chapeau à leur cercueil, ou consacrer un mot à leur mémoire. J'ai trouvé plus à étudier et à peindre dans les rangs intermédiaires de la société, que dans ceux qui font porter leur livrée : une casaque brochée d'or ne vaut pas le morceau de flanelle que la balle avait enfoncé dans le ventre de Carrel." (Mémoires d'Outre-Tombe, IV, éditions Flammarion Grand Format, Septembre 1982, p. 541).

dimanche 22 février 2009

Mercredi 18 Février 2009.

Comment mieux évoquer les métamorphoses successives provoquées en nous par le temps qui passe, que par ces lignes :"Il est à peine un homme qu'on ne puisse opposer à lui-même : d'années en années, de mois en mois, nous avons écrit, dit et fait tout le contraire de ce que nous avons écrit, dit et fait aujourd'hui. A force d'avoir à rougir, nous ne rougissons plus ; nos contradictions échappent à notre mémoire, tant elles sont multipliées. Pour en finir, nous prenons le parti d'affirmer que nous n'avons jamais varié, ou que nous n'avons varié que par la transformation progressive de nos idées et par notre compréhension éclairée des temps. Les événements si rapides nous ont si promptement vieillis, que quand on nous rappelle nos gestes d'une époque passée, il nous semble que l'on nous parle d'un autre homme que nous, peut-être d'un de nos homonymes, peut-être d'un de nos cousins remué de germain que nous n'avons jamais connu. Et puis, avoir varié, c'est avoir fait comme tout le monde." (Mémoires d'Outre-Tombe, , éditions Flammarion Grand Format, Septembre 1982, p. 516)
*
* *
Et que dire, au sujet du Roi Louis-Philippe, de cet art extraordinaire de la diatribe : " Philippe n'est pas un vrai Roi, c'est le Prévôt ou le grand sergent de ville de la Royauté à qui l'Europe crache au visage : le délateur patenté s'essuie et remercie, pourvu qu'on le maintienne dans sa place.
Au reste c'est le seul prince que les Français soient à présent capables de supporter. La dégradation du chef élu, fait sa force : nous trouvons dans sa personne ce qui suffit à nos habitudes de couronne, et à notre penchant démocratique; nous obéissons à un pouvoir que nous croyons avoir le droit d'insulter ; c'est tout ce qu'il nous faut de liberté : nation à genoux nous souffletons notre maître, rétablissant le privilège à ses pieds, l'égalité sur sa joue. Narquois et rusé, Louis XI de l'âge philosophique, le monarque de notre choix conduit dextrement sa barque sur une boue liquide dont le déversoir est à l'égout."(p. 517, op. cit.)
*
* *
Et que dire de ces lignes prophétiques, écrites en 1837 : "ce n'est pas la république qui est impossible, mais la monarchie" (p.518, op. cit;) , ou encore : "un Président aujourd'hui remplirait parfaitement les fonctions d'un Roi." (p. 518, op.cit.).
*
* *
Et puis voilà le sublime : "nous passons trop promptement pour que la punition de Dieu puisse toujours se placer dans le court moment de notre existence ; la punition descend à l'heure venue; elle ne trouve plus le premier coupable; mais elle trouve sa race qui laisse l'espace pour agir." (p. 521, op. cit.)
*
* *
A propos de l'inconstance de "l'esprit français" : "Qui saurait deviner et expliquer comment il adore et déteste tour à tour, comment il dérive d'un système politique à un système diamétralement opposé, comment, la liberté à la bouche et le servage au coeur, il croit le matin à une vérité et est persuadé le soir d'une vérité contraire ? " (p. 528 et 529, op.cit.).
*
* *
Il faut voir comment "l'homme aux songes " crée des images inoubliables : "L'époque où nous entrons est le chemin de halage par lequel des générations fatalement condamnées tirent l'ancien monde vers un monde inconnu."(p.529, op. cit. ). Et, enfin , comment lui-même se met en scène en spectateur de la tragédie de l'Histoire : "Et moi, spectateur assis dans une salle vide, loges désertées, lumières éteintes, je reste seul de mon temps devant le rideau baissé avec le silence et la nuit." (p. 533, op. cit.)

Mardi 10 février 2009.

Je lis, page 474 du Tome IV des Mémoires d'Outre -Tombe (éditions Flammarion Grand Format, 1982), la ligne suivante : "Dans Charles X, l'homme m'attendrit, le monarque me blesse". Je pourrais écrire aujourd'hui la phrase exactement inverse, à propos de quelqu'un auquel je pense :"Dans .........,l'homme me blesse, le ........m'attendrit".
*
* *
Page 475 (op.cit.), ces lignes remarquables de lucidité : "Quand la société croule, quand les monarchies finissent, quand la face de la terre se renouvelle, Charles X établit à Prague un gouvernement en France, de l'avis de son conseil, MM. de Blacas, de Damas et de Latil entendus. Ne nous raillons pas trop : qui de nous n'a sa chimère ? Qui de nous ne donne sa becquée à de naissantes espérances ? Qui de nous n'a son gouvernement in petto de l'avis de ses passions entendues ? La moquerie m'irait mal à moi, l'homme aux songes. Ces Mémoires que je barbouille en courant, ne sont-ils pas mon gouvernement, de l'avis de ma vanité entendue ? Ne crois-je pas très sérieusement parler à l'avenir, aussi peu à ma disposition que la France aux ordres de Charles X?"
*
* *
Comment ne pas me reconnaître, aussi, dans cette autre phrase de la page 482 (op. cit.) : "Telle est ma nature : j'idéalise les personnages réels et personnifie les songes , déplaçant la matière et l'intelligence."

vendredi 30 janvier 2009

Samedi 31 Janvier 2009. 7H36

Sur la route de Prague, pour la deuxième fois, Chateaubriand découvre, dans une chambre d'hôtel, dans la descente du col du Tauërn, des gravures qui évoquent le personnage éponyme d'un de ses romans, Atala. Il écrit :"La vanité fait argent de tout : je me rengorgeais devant mes oeuvres au fond de la Carinthie, comme le cardinal Mazarin devant les tableaux de sa galerie. J'avais envie de dire à mon hôte :"C'est moi qui ai fait cela !" Il fallut me séparer de ma première-née, moins difficilement toutefois que dans l'île de l'Ohio." (Mémoires d'Outre-Tombe, Flammarion, Grand Format, IV, p. 460, édition de septembre 1982).
Je comprends d'autant mieux cela que, pour mon oeuvre de poète, le moindre adjectif élogieux que l'on m'adresse, dans des "Commentaires" de "Forums Poétiques" , sur internet, me flatte éperdûment. Oui, Monsieur le Vicomte, indubitablement, "la vanité fait argent de tout".
*
* *
J'admire l'évocation, sous la plume de Chateaubriand, de la ville de Salzbourg, le 24 Septembre 1833 : "Dans la plaine de Salzbourg le 24 au matin, le soleil parut à l'est des montagnes que je laissais derrrière moi" (p. 460 et 461, op. cit.). Ce qui est merveilleux, dans ces lignes et les suivantes, c'est que l'éphémère est le sujet de l'écriture, et que cette écriture lui confère l'éternité. Plus que l'éternité , peut-être, cette écriture confère, à ce dont elle parle, une intemporalité, une modernité, toujours renouvelée. Cette matinée de septembre 1833 est peut-être vieille de cent soixante-dix ans, elle a gardé la fraîcheur, du "vierge , vivace, bel aujourd'hui". Peut-être vivrons-nous, demain, une matinée semblable et Chateaubriand nous invite à ouvrir les yeux, à déchiffrer, à notre tour, les effets sur le paysage de "l'ascension du soleil" (p. 461, op. cit.).
*
* *
Et que dire de cette évocation des lueurs du crépuscule ! La lune "mêlait sa clarté céruléenne à la lueur carminée du crépuscule ; double lueur d'une teinte et d'une fluidité indéfinissables." (p. 463, op. cit.). Il y a là un talent de peintre, dont le tableau, une fois encore, atteint les rives de l'intemporalité.
Les rois, les empereurs abdiquent, les présidents démissionnent, ou bien le peuple les renverse. Nous voyons, aujourd'hui, des villes englouties par des cyclones , des tsunamis, des séismes. Des génocides font disparaître des populations entières, avec les monuments qu'ils avaient dressés pour témoigner de ce qu'ils furent...A l'abri des ravages de la nature et des hommes, il reste, dans un écrin de mots, les marques qu'ont laissées, dans l'âme d'un poète, la couleur d'un ciel, au soleil levant , ou au crépuscule.

dimanche 18 janvier 2009

Lundi 19 Janvier 2009. 6H28

17/1/09 : sur France-Musique, vers 14H : L'Oiseau de Feu, de Stravinsky, par l'orchestre de Paris, dirigé par Pierre Boulez, en Décembre 2008, dans le Hall de la Pyramide du Louvre : musique chatoyante, d'une force et d'une ampleur inouïes. les dernières secondes sont un envol majestueux.
18/1/09 : pensé , dès le matin, à toute la poésie amoureuse écrite par les poètes, depuis des siècles. Me suis senti terriblement éloigné , soudain, de cette poésie-là, moi qui en ai , pourtant, moi-même, beaucoup écrit. L'espace d'un instant, je l'ai ressentie comme un exhibitionnisme, une impudeur. J'écris ces lignes, alors que peut-être, demain, j'en écrirai , à nouveau. Dieu seul le sait !

jeudi 15 janvier 2009

Jeudi 15 Janvier 2009. 21H20

Beaucoup d'êtres sont comme des oiseaux captifs : captifs de leurs métiers, captifs de leurs passions... Captifs, ne le sommes-nous pas, tous ?

mercredi 14 janvier 2009

Mercredi 14 Janvier 2009. 16H28

Dans les Mémoires d'Outre-Tombe, IV, Flammarion Grand Format, p. 451 (édition de septembre 1982), Chateaubriand écrit : "A onze heures je montai en voiture : la nuit était pluvieuse. Il me semblait retourner à Venise, car je suivais la route de Mestre : j'avais plus envie de revoir Zanze que Charles X." Tout Chateaubriand est là, (et peut-être tout homme?) dans cette oscillation entre deux univers peut-être inconciliables, qui ont , souvent, été l'objet de sa quête, au long de sa vie, et qui lui sont, tous deux, devenus inaccessibles : le plaisir et le pouvoir.

jeudi 1 janvier 2009

Vendredi 2 Janvier 2009. 6H52

Chateaubriand est, à la fois, dans l'Histoire, et a, en même temps, conscience de l'aspect théâtral et ridicule des événements historiques infimes qu'il est, parfois, en train de vivre : "Je trouvais que nous ressemblions pas mal à une troupe ambulante de comédiens français, jouant à Ferrare, par la permission de Messieurs les magistrats de la ville, la Princesse fugitive ou la Mère persécutée."(p. 432, Mémoires d'Outre-Tombe, IV, Flammarion, 1982).
C'est aussi cette distance de soi à soi qui fait l'écrivain.